mercredi 28 avril 2010

Un beau témoignage

Retour sur une aventure ordinaire vécue au contact de gens extraordinaires.

J-2, Mercredi:

Arrivée au troisième étage, déjà celles que j’appellerai plus tard mes "anges gardiens" m’attendent ! Je ne serais jamais considéré comme un malade ou quelqu’un de diminué tout au long de mon séjour. Toujours elles respecteront l’intégrité physique et morale de la personne leur faisant face, même lorsque j’aurais du mal à sortir des brumes de l’anesthésie, même lorsque j’aurais des défaillances physiques. Moi qui ne parle pas beaucoup, elles sauront interpréter mes silences, mes non-dits !
Rarement, j’aurais eu l’occasion de rencontrer autant d’humanité en toute simplicité, naturellement.

J-1, Jeudi:

Début d’après-midi : mon infirmière, avant d’être descendu au bloc pour la pose de la péridurale, me prépare pour l’intervention du lendemain. Je commence à être impressionné, je suis rasé de la poitrine à mi-cuisse ! Elle me confirme que c’est une intervention lourde ; l’aurais-je sous-estimée ? Peu importe, il est trop tard pour reculer et j’ai une totale confiance dans le docteur L******.
Je crois qu’à ce moment-là, j’ai senti également que je pouvais faire totalement confiance à l’équipe soignante du 3° étage.
La péridurale est posée ainsi qu'une perfusion, je suis remonté dans la chambre. Je tremble de partout, c’est incontrôlable. J’ai la sensation que mon corps a pris ça pour une agression et qu’il essaie de se défendre. J’ai énormément de mal à terminer le SMS que j’enverrais à Sylvie et aux enfants pour les prévenir.
Dernier examen avant l’opération : radio avec lavement. Le docteur L****** est là pour repérer les diverticules. Ils sont bien localisés sur le sigmoïde ; il n’y aura pas de mauvaises surprises demain ! Je remonte chambre 312, mes "anges gardiens" ont encore et toujours le sourire. Je me sens de plus en plus en confiance.
L’équipe de jour cède la place à celle de nuit non sans m’avoir souhaité bon courage pour le lendemain.

Jour J, Vendredi:

Réveil à 5h00 (Et toujours avec le sourire, malgré la fatigue!) pour me préparer pour le bloc. Toilette à la Bétadine puis tenue de bloc et médicaments. Ceux-ci me décontractent un peu trop, je me rendors. On vient me chercher pour le bloc, à nouveau on me souhaite bon courage! 8h00 (environ) : pose de la voie centrale, on me retire la perfusion. 8h30 : le docteur L****** arrive, elle aussi toujours avec le sourire. L'anesthésie démarre, je plonge rapidement dans les ténèbres.
?h??, je me réveille dans la salle du même nom, le docteur L****** est là. L'opération s'est bien déroulée. Ce qu'elle m'a retiré n'était pas très joli, mais c'est du passé maintenant.
12h45 : retour chambre 312 (Tout s'est tellement bien passé durant ces douze jours, que le nombre 312 deviendra certainement un nombre fétiche pour moi!); au milieu des brumes anesthésiques, je distingue encore une fois le docteur L******. Puis des lumières prennent le relais, mes "anges gardiens" qui ne me laisseront plus jamais seul me tirent hors de la zone d'ombre. Mon combat contre la douleur va devenir leur combat, elles ne laisseront jamais celle-ci s'installer durablement. Elles me questionneront, me feront participer (c'était important!), interpréteront mes réponses, mes expressions et au final adapteront le traitement contre la douleur. Comment pourrais-je un jour les remercier suffisamment ?
Je crois sincèrement que leur présence ce jour-là m'a fait plus de bien que l'oxygène.
Sylvie et les enfants sont là, mes "anges gardiens" vont pouvoir souffler un peu.

J+1, Samedi:

On me lève pour la toilette et refaire le lit. La douleur est présente et augmente vite. Mais c'est important pour le moral de regagner en autonomie, si petit ce progrès soit-il. Toujours, elles seront là pour m'assister, mais jamais elles ne feront plus que le nécessaire sauf si je leur demande.
Début de l'alimentation liquide sous perfusion. La remise en marche de la "machine" s'amorce à partir de ce moment-là! Le péristaltisme va se remettre doucement en route.
Samedi soir: durant mon séjour ce sera le seul infirmier que je verrais. Il vient du 1er étage et m'explique en long et en large le fonctionnement de la pompe pour péridurale, comment évaluer la douleur, etc.…
On convient ensemble que les poches d'alimentation liquide, ce sera ce soir du "confit de canard" et demain du "coq au vin". L'imagination, il n'y a que ça de vrai !

J+2, Dimanche:

Les cordons ombilicaux qui me maintenaient en état tombent un à un et je gagne en autonomie. Le monitoring avait été arrêté la nuit précédente, ce matin on m'enlève la péridurale et la sonde urinaire. Ensuite, toilette debout devant le lavabo. Mon ventre et mon dos me font un mal de chien, mes jambes ont du mal à me supporter mais j'insiste, je suis convaincu que c'est important pour la suite. Mes anges gardiens le savent aussi; ce n'est pas par désintérêt qu'elles me laissent seul sinon comment expliquer que jusqu'au dernier jour de ma présence à la clinique, il ne se sera pas passé une journée sans qu'elles me demandent au moins une fois où j'en étais avec la douleur?

J+3 Lundi:

Poussées de fièvre lundi après-midi. Demain il n'y aura plus grand-chose mis à part cette drôle de sensation racontée plus loin. Rêve ou réalité ?

J+4, Mardi:

Début de l'alimentation solide. Les gaz sont de retour et douloureux lorsque ça passe près de la cicatrice.
Dans la nuit de mardi à mercredi, mon corps me trahira. Je ne peux pas m'en sortir tout seul, la voie centrale me gêne, je suis obligé d'appeler. Là encore elles sont admirables; elles m'aident juste ce qu'il faut pour que je retrouve ma dignité, un instant mise à mal par les faiblesses du corps.

Je pourrais leur dire mille fois merci que je leur serais toujours redevable. Mais comment font-elles pour allier tant de professionnalisme avec autant de gentillesse, de douceur et d'humanité ? J'étais venu sur les conseils de mon médecin traitant et du docteur L******. J'avais déjà eu la chance de trouver un chirurgien en qui je pouvais avoir une confiance totale, sans conditions. J'ai ensuite trouvé au moins l'équivalent avec l'équipe soignante du troisième étage ce qui a contribué autant que les médicaments à me remettre sur pieds. Je les savais dévouées, mais j'ai été sidéré de constater à quel point elles pouvaient l'être!

Retour sur la nuit du lundi 23 au mardi 24

Suis-je encore sous l'influence des anesthésiques ? Ou est-ce l'effet de la fièvre qui s'est déclenchée cet après-midi ? On m'a certifié que rien ne s'était passé cette nuit-là.
Aux alentours de 3h30 du matin, je suis réveillé. Un peu de bruit et d'affairement dans les couloirs du troisième à une heure peu habituelle pour des soins. Soudain, un petit cri, un cri de refus, si léger que j'aurais pu ne pas l'entendre.
Puis deux mots: deux petits mots chargés de miséricorde, de chagrin et de tristesse :
-"Adieu Thomas"
Un bruit sinistre de sac plastique qu'on dézippe et qu'on zippe après y avoir placé quelque chose et puis quelques sanglots parce que la peine et le chagrin sont trop forts. Déjà ceux-ci s'estompent car il faut penser aux autres, à ceux qui restent; les voilà de nouveau à préparer les soins pour la visite de 5h00.
Alors pour celles qui n'ont pas eu le temps de s'épancher, j'ai pleuré, moi qui avait tout mon temps. J'ai pleuré pour mes "anges gardiens" et pour Thomas.

Thomas a-t-il existé? Est-il le fruit de mon imagination ? Ne serait-ce pas cet enfant que j'ai vu la veille dans la salle de confort du second avec ses parents ? Peu importe, je ne connais pas les prénoms ni les personnalités de mes "anges gardiens", mais j'ai vu leur âme à l'œuvre. Cela aurait pu se passer ainsi et je pense que certains ont dû connaître ou connaîtront de tels moments.
Alors pour un dévouement à nul autre pareil, je m'incline; pour avoir su rester sensible à la détresse humaine, je m'incline ; pour avoir fait preuve de qualités humaines exceptionnelles (surtout dans notre monde actuel), je m'incline!
Il y aurait tant de choses à dire encore, mais je m'arrête là car je risque l'éventration à force de m'incliner!!
Vous vous demandez peut-être : pourquoi cette lettre ? Vous êtes souvent en première ligne et quand ça se passe mal, on est prompt à chercher un responsable parmi les équipes soignantes. Quand ça se passe bien, on considère que c'est normal, que ça fait partie de votre travail. Et je suis certain que dans certains cas vous n'avez même pas droit à un simple merci !
Quand ça se passe bien, comme ce fut le cas pour moi, je pense qu'il est bon de le dire à tous et toutes que j'ai apprécié votre travail, vos qualités humaines, votre soutien; que j'ai également apprécié ce bout de chemin accompli ensemble pour me remettre sur les rails de la guérison.
Il est bon de rappeler que face à de grands moments de découragements, que vous devez connaître de temps en temps lorsqu'on s'investit comme vous le faites, il est des gens que vous avez accompagnés qui pensent à vous et vous soutiennent.

1 commentaire:

MiniVéro a dit…

a quand la rentrée ??